9 avril 2020 - Propositions de prise en charge des patients atteints de maladies du foie à l’occasion de la pandémie de Coronavirus 2019
Auteurs : Nathalie Ganne-Carrié, Hélène Fontaine, Jérôme Dumortier, Jérôme Boursier, Christophe Bureau, Vincent Leroy, Marc Bourlière
AFEF, Société Française d’Hépatologie
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Avertissement
Ce document rédigé sous l’égide de l'AFEF a pour but de fournir des informations aux médecins impliqués dans la prise en charge des patients atteints de maladie du foie. Ce ne sont pas des recommandations issues d'un examen systématique des données de la littérature et d’une évaluation rigoureuse selon la méthode GRADE. Il s’agit de préconisations établies à partir des retours d’expérience chinois disponibles sous forme d’articles originaux ou de lettres – dont le niveau de preuve scientifique est souvent peu élevé – et des règles proposées par les sociétés d’hépatologie américaine [1] et européenne [2], le Thésaurus National de Cancérologie Digestive [3] et la Société Francophone de Transplantation [4].
Ces propositions sont à moduler en fonction des particularités géographiques de l’épidémie, des circuits et de l’accès aux ressources locales.
Ce document sera actualisé le plus régulièrement possible en fonction de l’évolution des connaissances et des caractéristiques de l’épidémie.
Généralités
L’infection à coronavirus 2019 (COVID-19), liée au virus SRAS-CoV-2, se propage rapidement à travers le monde. Dans ce contexte totalement inédit et imprévu, nous devons réadapter les modalités de prise en charge des patients atteints de maladie du foie. Les objectifs de ce document sont de faire l’état des lieux des connaissances sur les relations entre COVID-19 et foie et d’anticiper les parcours de soins les plus sécurisés possibles afin d’atténuer l'impact de la pandémie sur les patients atteints de maladie du foie.
Les retours d’expérience chinois indiquent :
– la présence d’une hépatopathie chronique sous-jacente chez 2 à 11 % des patients pris en charge pour COVID-19 [5] ;
– une augmentation des transaminases chez 25 à 35 % des patients, généralement modérée (médiane 23-39 UI/ L), avec un taux plus élevé dans les formes symptomatiques et/ou sévères et/ou nécessitant une hospitalisation en unité de soins intensifs [5, 6] et/ou fatales [7]. Le mécanisme impliqué est incertain à ce jour. En effet, les données suggérant la possibilité de localisation du virus dans le foie sont préliminaires, et il est raisonnable d’incriminer les éléments du syndrome de réaction inflammatoire. Une altération marquée des tests hépatiques doit faire rechercher en priorité une autre cause notamment médicamenteuse (paracétamol, antibiotiques), ou liée à une hypoxie hépatique, à une myocardite virale fréquente dans cette situation, ou à une maladie chronique du foie sous-jacente, connue ou non. Un contrôle des sérologies des virus hépatotropes est recommandé dans cette situation ;
– l’expression du récepteur du SRAS-CoV-2 (récepteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2) par les cholangiocytes [8] ;
– le fait que les populations supposées à risque de forme sévère de COVID-19 comprennent les patients atteints de cirrhose, ceux atteints d'hépatite auto-immune sous médicaments immunosuppresseurs et les patients avant et après transplantation sous traitement immunosuppresseurs [9].
Outre les gestes barrières classiques, la prolongation de la dispensation des ordonnances périmées au premier trimestre 2020 (jusqu’au 31 mai, selon l’arrêté du 1er avril 2020) et la mise en œuvre du confinement depuis le 17 mars, des mesures simples sont proposées comme, par exemple, l’adaptation du suivi des patients des patients stables, idéalement en téléconsultation, l’arrêt de travail automatique des patients fragiles dont l’emploi serait incompatible avec du télétravail (https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/arret-travail-covid-19_2.pdf), l’admission directe des patients dans des unités Non COVID et la suppression des visites de l’entourage pour les patients hospitalisés.
Prises en charge préconisées
Patients SANS signe évocateur de COVID-19
Objectifs |
– Protéger ces patients d'une infection COVID-19 et poursuivre leur prise en charge dans des conditions sécurisées en évitant leurs déplacements. – Libérer les établissements de soins de cette activité pour leur permettre d’accueillir et de concentrer leurs ressources médicales et paramédicales sur les patients graves (atteints de COVID-19 ou pas). |
Ajustements éventuels des traitements étiologiques de l’hépatopathie |
VHB : Poursuivre les traitements par analogues en cours et les initier dans les situations d’urgence (cirrhose, réactivation) ou de risque élevé de transmission (usagers de drogues, migrants vivant en promiscuité…). VHC : Poursuivre les anti-viraux directs déjà débutés ; en règle générale différer le début de traitement à la fin du confinement chez les patients en attente en réitérant les conseils de prévention sauf dans les situations d’urgence (usagers de drogues, migrants vivant en promiscuité, autres…). VHD : Poursuivre les traitements en cours par bulévirtide plus ou moins associés à l’interféron-α dans le cadre de l’ATU de cohorte, mais en règle générale différer le début de traitement à la fin du confinement chez des patients en attente. Il est souhaitable de renouveler les conseils de confinement strict des patients et de gestes barrières, de déléguer si possible à un tiers le retrait mensuel des traitements à la pharmacie hospitalière (si celle-ci ne peut les expédier) et de faire réaliser les bilans biologiques mensuels à domicile par une infirmière (IDE). Alcool : Conseils de modération de consommation avec 2 jours d’abstinence par semaine et de ne pas profiter du confinement pour entamer un sevrage brutal qui risquerait un recours à un établissement de santé. NASH : Réitérer les conseils de confinement stricts et de gestes barrières chez les patients avec élément(s) de syndrome métabolique [9]. Hémochromatose génétique : Phase d’attaque : poursuite des saignées idéalement dans le cadre de saignée-don à l’EFS, sinon si possible à domicile par IDE ; différer le début ou la reprise des saignées à la fin du confinement. Phase d’entretien : différer les saignées à la fin du confinement. Maladies rares (hépatite auto-immune – HAI, CBP, CSP, Wilson…) : Traitement de fond en cours : poursuite et ne pas interrompre ni modifier les immunosuppresseurs dans un but préventif en cas d’HAI. Traitement à initier : à discuter au cas par cas en fonction de l’épidémie régionale, en concertation si besoin avec le centre de compétence local ; en cas d’HAI ; l’option privilégiée du centre de référence national serait une corticothérapie (prednisolone 0,5 mg/kg/j ou budésonide 9 mg/j dans les formes non sévères) avec début différé du traitement de fond. Transplantés hépatiques :Poursuite des traitements immunosuppresseurs sans modification [4]. |
1.a. Patients stables/ambulatoires
1.a.1. Sans fibrose hépatique avancée ni complication hépatique
Arrêt de travail |
Uniquement si comorbidité(s) [9] et si l’employeur ne peut garantir la possibilité de télétravail (https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/arret-travail-covid-19_2.pdf) |
Consultations |
Adaptation des consultations de suivi non urgentes initialement prévues en présentiel. =>Réorientation sur une prise en charge sécurisée vis-à-vis du risque infectieux (Téléconsultation/Consultation téléphonique) afin d’éviter les ruptures de suivi. +Prolongation des ordonnances auprès des pharmaciens. +Intervention d’IDE à domicile si besoin. |
1.a.2. Avec fibrose hépatique avancée et/ou complication hépatique
Arrêt de travail |
Conseillé pour une durée initiale de 21 jours si l’employeur ne peut garantir la possibilité de télétravail (https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/arret-travail-covid-19_2.pdf)
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Consultations |
Présence non indispensable : Adaptation des consultations de suivi non urgentes initialement prévues en présentiel. Réorientation sur une prise en charge sécurisée vis-à-vis du risque infectieux (Téléconsultation/Consultation téléphonique) afin d’éviter les ruptures de suivi. + Intervention des IDE à domicile sur prescription médicale si besoin. + Prolongation des ordonnances auprès des pharmaciens après avis médical en cas de polymédication (> 5 médicaments) ou en cas de renouvellement de traitement instauré dans les 3 mois. La poursuite des traitements de prophylaxie primaire ou secondaire chez les patients avec ascite, hypertension portale cliniquement significative et/ou encéphalopathie est essentielle pour éviter une hospitalisation.
Présence indispensable (consultation d’annonce avant traitement d’un cancer du foie, nouveaux patients avec motif cliniquement significatif : ictère, cytolyse > 10 fois la limite supérieure de la normale, décompensation récente). Dépister à l’interrogatoire des signes de COVID-19 en amont de la venue à l’hôpital, et à l’accueil (+ prendre la température à l’accueil) et en cas de doute pratiquer un dépistage du COVID-19 idéalement avant l’arrivée dans le service selon le circuit habituel de l’institution. Faire porter un masque chirurgical (quand les ressources le permettent) au patient dès l’arrivée dans la structure médicale. Mettre en place les mesures barrières : désinfecter le matériel (sièges, poignées…) entre deux patients, éviter les attentes groupées, réduire les délais de séjour en salles d'attente, y supprimer les journaux, maintenir une distance de 1 mètre entre chaque patient, aérer fréquemment la salle d'attente, appliquer, autant que possible, les règles d'hygiène et de protection du personnel soignant. |
Bilans programmés/HDJ – HDS |
– Déprogrammation des séjours et actes non indispensables ni urgents. => Dans les régions très impactées par l’épidémie (phases de pic ou de plateau), décaler dans le temps avec un délai arbitraire d’1 à 2 mois : – les imageries périodiques de CHC traités ou en cours de traitement, et de dépistage semestriel de CHC sur cirrhose (ou éventuellement réalisation en ville en mobilisant les ressources disponibles) ; – les biopsies hépatiques non urgentes ; – les mesures d’élasticité hépatique et/ou de CAP.
Il est prudent de différer au maximum selon la balance bénéfice/risque les bilans pré-transplantation ou d’effectuer la plupart des examens en dehors de l’hôpital selon les ressources locales.
– Maintien des séjours programmés dans des unités non COVID, en s’assurant avant chaque admission que les patients ne présentent pas de signes de COVID-19 et en redoublant de vigilance pour les protéger (masque chirurgical dès l’arrivée dans la structure, mise en place de mesures barrières avec éviction des attentes groupées notamment aux admissions et dans les salles d’attente, réduction des délais d'attente, chambre seule si possible, maintien d’une distance de 1 mètre entre chaque patient, application des règles d'hygiène du personnel soignant et limitation du nombre de soignants impliqués dans la prise en charge) pour les principales indications suivantes : – les traitements des cancers primitifs du foie à visée curative (chirurgie et radiologie interventionnelle) [3], – les ponctions évacuatrices d’ascite, – les séances de ligature de varices œsophagiennes et de sclérose de varices gastriques en prévention secondaire, – les biopsies hépatiques urgentes.
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Essais cliniques |
– Inclusions à différer à la fin du confinement dans la mesure du possible, sauf essais COVID-19 et essais observationnels hors COVID-19 (évaluation de la balance bénéfices/risques individuels). – Au cas par cas, évaluer avec le promoteur la possibilité de réaliser des consultations à distance, les prélèvements sanguins par IDE à domicile et l’expédition à domicile des traitements d’investigation. |
Vaccinations |
En l’absence de couverture vaccinale contre le pneumocoque : réaliser la première injection de vaccin pneumococcique polyosidique (13-valent, adsorbé) si cela ne remet pas en cause le confinement, sinon la différer à la fin de celui-ci. |
1.b. Patients nécessitant une hospitalisation traditionnelle
Conduite à tenir |
Hospitaliser en secteur/service identifié NON COVID-19 en : – s’assurant avant chaque admission de l’absence de signes de COVID-19 et en prenant la température à l’arrivée ; – réalisant un TDM thoracique de dépistage et/ou une PCR sur prélèvement naso-pharyngé pour dépistage de COVID-19 avant admission en cas de décompensation récente inexpliquée [2] – privilégiant les admissions directes dans le service sans passage par le SAU ; – prenant toutes les mesures pour éviter une contamination (masque chirurgical à tous les patients dès l’arrivée dans la structure, hygiène des mains par l’application de gel hydroalcoolique, mise en place de mesures barrières avec éviction des attentes groupées notamment aux admissions, réduction des délais d'attente, maintien d’une distance de 1 m entre chaque patient, application des règles d'hygiène du personnel soignant, limitation du nombre de soignants impliqués dans la prise en charge et des visites si elles restent autorisées). NB : De telles mesures très strictes ont fait la preuve de leur efficacité en termes de mortalité chez 111 patients chinois avec cirrhose décompensée dont 2/3 hospitalisés et 1/3 ambulatoires [10]. |
Patients AVEC signes évocateurs de COVID-19
Objectif |
Protéger, autant que possible, le personnel soignant et les patients NON COVID d’une contamination COVID-19 en prenant en charge le patient dans des conditions sécurisées. |
Ajustements des traitements étiologiques de l’hépatopathie |
VHB : Poursuivre les traitements par analogues ou les initier dans les situations d’urgence (cirrhose et réactivation) si l’état du patient le permet. VHC : Poursuivre les anti-viraux directs déjà débutés si l’état du patient le permet, mais différer le début de traitement. VHD : La poursuite (ou la diminution de posologie) des traitements anti-viraux en cours par Bulevirtide plus ou moins associés à l’interféron dans le cadre de l’ATU de cohorte doit être discutée au cas par cas en fonction de la sévérité du COVID-19 et de son retentissement sur l’hépatopathie (balance bénéfice/risque individuelle), en concertation si besoin avec le Service Expert de Lutte contre les Hépatites Virales locorégional. En cas de poursuite des traitements en ambulatoire, il est impératif de renouveler les conseils de confinement strict et de gestes barrières, de déléguer si possible à un tiers le retrait mensuel des traitements à la pharmacie hospitalière et de faire réaliser les bilans biologiques mensuels à domicile par une IDE, en l’absence d’hospitalisation. Dans les COVID-19 avec altération de la fonction rénale (clairance < 60 mL/min), et/ou décompensation de l’hépatopathie, le bulevirtide devra être suspendu. Alcool : Renouveler les conseils de modération de consommation avec au moins 2 jours d’abstinence par semaine et si possible ne pas entamer de sevrage brutal. NASH : Rester vigilant car un grand nombre de ces patients sont à risque de forme sévère (s’ils ont un ou des élément(s) de syndrome métabolique listé(s) dans la référence [9]). Hémochromatose génétique : Interrompre transitoirement les saignées. Maladies rares traitées (HAI, CBP, CSP, Wilson…) : La poursuite ou la diminution éventuelle de posologie des traitements de fond doit être discutée au cas par cas en fonction de la sévérité du COVID-19 et de la balance bénéfice/risque individuelle avec les internistes/infectiologues/réanimateurs d’une part et l’hépatologue d’autre part, avec si besoin l’aide du centre de compétence régional voire du centre de référence national. Pour les corticoïdes, une diminution de dose peut être discutée si nécessaire mais en maintenant une dose d'au moins 10 mg/j pour éviter une insuffisance surrénale. Les autres immunosuppresseurs, notamment l’azathioprine (Imurel®) ou l’acide mycophénolique (Cellcept®), peuvent être diminués si nécessaire, notamment en cas de lymphopénie, de surinfection bactérienne ou fungique ou d'aggravation pulmonaire liée au COVID-19.
Transplantés [4] : 1. Infection COVID-19 symptomatique ambulatoire ou hospitalisée sans signe de gravité (non oxygéno-requérant) 1.1 -Patient < 1 an de la transplantation – Arrêt corticothérapie sauf contexte de haut risque immunologique de rejet ou de récidive de la maladie auto-immune où la dose de corticoïde sera diminuée et maintenue à 5 mg/jour. – Arrêt acide mycophénolique (Cellcept®, Myfortic®) ou azathioprine (Imurel®) et reprise dès guérison virale à la dose préalable à l’arrêt. – Maintien du tacrolimus en ciblant des concentrations sanguines résiduelles entre 4 et 8 ng/mL ou de la ciclosporine en ciblant des concentrations sanguines résiduelles entre 100-150 ng/mL ou des concentrations sanguines à 2 heures de la prise (C2) de 400-600 ng/mL. Pour les patients sous inhibiteurs de mTOR : v Pour les patients sous bithérapie tacrolimus + inhibiteurs de mTOR : arrêt de l’inhibiteur de mTOR (Rapamune® ou Certican®) et reprise dès guérison à la dose préalable à l’arrêt, maintien du tacrolimus en ciblant des concentrations sanguines résiduelles entre 4 et 8 ng/mL. v Pour les patients sous bithérapie acide mycophénolique (Cellcept® ou Myfortic®) + inhibiteur de mTOR, diminution de moitié de l’acide mycophénolique et maintien de l’inhibiteur de mTOR (Rapamune® ou Certican®) avec des concentrations sanguines résiduelles entre 4 et 6 ng/mL et reprise dès guérison à la dose préalable à l’arrêt 1.2 - Patient > 1 an de la transplantation – Patient sous corticoïdes en raison d’un haut risque immunologique ou d’un risque de récidive de maladie auto-immune : maintenir corticoïdes (même dose). – Arrêt de l’acide mycophénolique (Cellcept®, Myfortic®) ou de l’azathioprine (Imurel®) et reprise dès guérison à la dose préalable à l’arrêt. – Pour les patients sous inhibiteurs de la calcineurine, maintien du tacrolimus et la ciclosporine à la même posologie. – Pour les patients sous inhibiteurs de mTOR : v Pour les patients sous bithérapie tacrolimus + inhibiteur de mTOR : arrêt de l’inhibiteur de mTOR (Rapamune® ou Certican®) et reprise dès guérison à la dose préalable à l’arrêt, maintien tacrolimus et la ciclosporine à la même posologie. v Pour les patients sous bithérapie acide mycophénolique (Cellcept® ou Myfortic®) + inhibiteur de mTOR : arrêt de l’acide mycophénolique (Cellcept® ou Myfortic®) et reprise dès guérison à la dose préalable à l’arrêt et maintenir l’inhibiteur de mTOR à la même posologie. v Pour les patients sous monothérapie par acide mycophénolique (Cellcept® ou Myfortic®) ou inhibiteur des mTOR : maintenir le même traitement à la même posologie. 1.3 -Dans toutes les situations – Revenir au traitement préalable à l’épisode infectieux à partir de J14 du début des symptômes. – Autosurveillance quotidienne (température, dyspnée, douleur thoracique). – Appel téléphonique régulier par le médecin responsable du patient (ex : J3, puis J7 – important car période à risque d’aggravation). – Confinement à domicile jusqu’à 10 jours après l’apparition des symptômes. – Sortie avec masque jusqu’à J14 du début des symptômes. 2. Infection COVID-19 hospitalisée oxygéno-requérant et/ou lymphopénique – Maintien des corticoïdes à 10 mg/jour d’équivalent prednisone. – Arrêt du reste du traitement immunosuppresseur. – Si patient à haut risque immunologique ou proche de la date de la greffe et s’il ne présente pas de lymphopénie : v Maintenir l’inhibiteur de la calcineurine en ciblant des concentrations sanguines résiduelles entre 4 et 8 ng/mL pour le tacrolimus et entre 100-150 ng/ml de C0 ou 400-600 ng/mL de C2 pour la ciclosporine. v Reprise du traitement préalable à l’épisode infectieux dès le sevrage de l’oxygénothérapie. 3. Infection COVID-19 grave avec syndrome de détresse respiratoire aigu – Maintien des corticoïdes à 10 mg/jour d’équivalent prednisone. – Arrêt du reste du traitement immunosuppresseur. – Reprendre la posologie du tacrolimus entre 3-5 ng/mL dans les 72 heures du sevrage de la ventilation. Reprise du traitement préalable dès guérison virale tenant compte de la durée prolongée d’excrétion virale. |
Mesures générales |
– Limiter l’usage du paracétamol à visée antipyrétique à 2-3 g/jour notamment chez les patients atteints de cirrhose et/ou avec consommation excessive d'alcool. – Contre-indication formelle aux AINS. – Vérifier l’absence d’interaction médicamenteuse entre les traitements habituels de l’hépatopathie et ceux utilisés dans le cadre de la prise en charge du COVID-19 (Annexe). En raison de l'atteinte hépatique potentiellement sévère chez certains patients, l'amplitude de ces interactions peut être importante et la prudence doit s'imposer. – Les endoscopies diagnostiques ou thérapeutiques chez les patients avec COVID-19 doivent être limitées aux urgences (hémorragie digestive, cholangite bactérienne ou autres urgences vitales). – La prise en charge nutritionnelle doit être optimisée avec la prescription d’au moins 3 compléments nutritionnels oraux par jour chez tout patient qui ne peut s’alimenter hors réanimation et limitation de soins [11]. |
2.a. Patients sans fibrose hépatique avancée ni complication hépatique :
Ces patients relèvent de la même prise en charge que la population générale. Sans signes de gravité du COVID-19, ces patients sont pris en charge à domicile avec confinement.
2.b. Patients avec hépatopathie avancée ou hépatite aiguë ne nécessitant pas d’hospitalisation
En cas de suspicion de COVID-19, la nécessité de recourir ou non à une hospitalisation est confirmée par le médecin traitant et/ou les urgences et/ou le SAMU.
Ces patients nécessitent d’être testés par PCR et/ou TDM thoracique, et étroitement surveillés [12]. Sans signes de gravité du COVID-19, ces patients sont pris en charge à domicile avec isolement.
Les modalités de suivi sont décidées sur appréciation médicale :
– Auto-surveillance simple des symptômes, sans programmation ultérieure de consultation.
– Suivi médical (téléconsultation à privilégier si possible) entre J6 et J10 pour surveillance
– Un suivi renforcé à domicile par IDE pour sujets à risque ne pouvant assumer une auto-surveillance.
S’ils se rendent en consultation, les patients doivent prévenir le personnel soignant de leur arrivée, signaler leur condition et porter un masque le plus en amont possible du circuit.
2.c. Patients avec hépatopathie chronique avancée ou hépatite aiguë sévère nécessitant une hospitalisation pour une complication hépatique
Ces patients relèvent d’une prise en charge dans un secteur/service identifié COVID-19+, si possible dans l’établissement où le patient est connu et habituellement suivi, en faisant appel à l’équipe d’hépatologie qui s’en occupe habituellement.
Références
1. Clinical Insights for Hepatology and Liver Transplant Providers During the COVID-19 Pandemic. https://www.aasld.org/sites/default/files/2020-03/AASLD-COVID19-ClinicalInsights-3.23.2020-FINAL-v2.pdf
2. Boettler T, Newsome PN, Mondelli M, et al. EASL-ESCMID Considerations for the care of patients with liver disease during the COVID-19 pandemic. J Hepatol Reports 2020, In Press
3. Di Fiore F, Bouché O, Lepage C, et al. Propositions of alternatives in digestive cancers management during the COVID-19 epidemic period: A French intergroup clinical point of view (TNCD). Dig Liver Dis 2020 sous presse ; https://www.snfge.org/content/21-prise-en-charge-des-cancers-digestifs-en-fonction-de-la-situation-epidemique-covid-19
5. Zhang C, Shi L, Wang FS. Liver injury in COVID-19 : management and challenges ; Lancet Gastroenterol Hepatol. 2020 Mar 4. pii : S2468-1253(20)30057-1. doi : 10.1016/S2468-1253(20)30057-1. PMID :32145190.
6. Xu L, Liu J, Lu M, Yang D, Zheng X. Liver Int. 2020 Mar 14. doi : 10.1111/liv.14435. PMID : 32170806
7. Zhou F, Yu T, Du R, et al. Clinical course and risk factors for mortality of adult inpatients with COVID-19 in Wuhan, China: A retrospective cohort study. Lancet 2020 ; 395 (10229) : 1054-1062.
8. Chai X, Hu L, Zhang Y, et al. bioRxiv 2020. https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2020.02.03.931766v1.full.pdf
9. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/new_hcsp-sars-cov-2_patients_fragiles_v3.pdf
10. Xiao Y, Pan H, She Q, Wang F, Chen M. Prevention of SARS-CoV-2 infection in patients with decompensated cirrhosis. Lancet Gastroenterol Hepatol. 2020 Mar 17. pii : S2468-1253(20)30080-7. doi : 10.1016/S2468-1253(20)30080-7. PMID : 32197093
11. https://www.sfncm.org/1204-covid19-avis-experts
12. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/covid-19_doctrine_ville_v16032020finalise.pdf
Annexe. Évaluation du risque d'interactions médicamenteuses entre les traitements de la maladie du foie et les traitements du COVID-19
Traitement de l'hépatite B :
Antiviral anti-VHB/Traitement du COVID-19 |
Remdesivir |
Lopinavir/Ritonavir |
Hydroxychloroquine |
Ténofovir disoproxil |
Risque d'interaction faible |
Risque d'interaction modérée – Augmentation des concentrations de ténofovir – Surveillance de la fonction rénale |
Risque d'interaction faible |
Entéecavir |
Risque d'interaction faible |
Risque d'interaction faible |
Risque d'interaction faible |
Traitement de l'hépatite C :
Antiviral anti-VHC/Traitement du COVID-19 |
Remdésivir |
Lopinavir/Ritonavir |
Hydroxychloroquine |
Sofosbuvir 400 mg + Velpatasvir 100 mg |
Risque d'interaction faible |
Risque d'interaction faible |
Risque d'interaction faible |
Sofosbuvir 400 mg + Velpatasvir 100 mg + Voxilaprévir 100 mg |
Risque d'interaction faible |
Augmentation des concentrations de Voxilaprévir – Association non recommandée |
Risque d'interaction faible à modéré – Surveillance cardiaque par ECG et suivi thérapeutique pharmacologique des concentrations d'hydroxychloroquine |
Glécaprévir 100 mg + Pibrentasvir 40 mg |
Risque d'interaction faible |
Augmentation des concentrations de Glécaprévir et Pibrentasvir – Association non recommandée |
Risque d'interaction modéré – Surveillance cardiaque par ECG et suivi thérapeutique pharmacologique des concentrations d'hydroxychloroquine |